Ventiane - Huay Xai: Laos dans les montagnes

Comme vous avez pu le remarquer ces derniers  temps on change de pays comme on change de caleçon, c’est-à-dire à peu près une fois par semaine. Après le Vietnam, le Cambodge et la Thaïlande nous voilà donc au Laos, à Ventiane, la capitale, plus précisément. Le Laos traîne la réputation de pays qui vit à un rythme ralenti et Ventiane celle d’être une gentille bourgade sans grand intérêt. Ça tombe plutôt bien car nous sommes à la recherche de calme et de repos. Après une semaine bien remplie dans l’effervescence thaïlandaise nous goutons avec plaisir à l’activité paisible des rues de Ventiane. Nous ne sommes cependant pas seuls dans la ville, de nombreux touristes de passage arpentent les avenues de la capitale avant de partir à l’assaut du très couru nord Laos. De notre côté le programme est assez simple, ne rien faire pendant 24h date à laquelle nous repartons nous aussi vers le grand nord. Quand il s’agit de ne rien faire, on est très fort, des grands maîtres même ! Quand nous ne mangeons ,ni ne dormons pas nous déambulons  tranquillement dans les rues du centre ou allons saluer notre vieux pote le Mekong que nous retrouvons avec joie.
         Mais comme à chaque fois «à m’ment donné il faut remonter sur le vélo ». Ça se traverse pas tout seul les pays figurez-vous. Le réveil sonne, nous bondissons de notre lit tel des fauves affamés de kilomètres et nous nous élançons sur la terrible route 13 (oulala ça fout les choquottes ça !). et filons vers le nord.  Notre programme au Laos est chargé car il y’a beaucoup à faire mais pour une fois nous avons le temps ! Autant de jours de repos que de jours de bicyclette, que demande le peuple ? Après quelques kilomètres nous doublons un cycliste : sacoches Ortlieb et guidon papillon, notre œil averti ne s’y trompe pas c’est bien l’un des nôtres. 



Vincent entame donc la discussion avec le camarade : Giam est un malais d’une soixantaine années ancien radiologue et féru de voyage à vélo qui est parti de chez lui un beau matin et va jusqu’à Hanoi au Vietnam. La conversation se poursuit sans que Vincent n’ose poser la seule question qui lui brule vraiment les lèvres :  « pourquoi fait il du vélo en jean sous cette chaleur ? ». Ce qui est amusant c’est que la veille à Ventiane nous avions croisé Sam un chinois très sympa de 19 balais engagé dans un grand voyage depuis la Chine jusqu’à l’Europe et l’Afrique. Entre Giam  60 ans et Sam 19 ans, voilà un beau grand écart , comme quoi il n’y a pas d’âge pour faire du vélo. Tout ça pour dire que la  route que nous empruntons semble très fréquentée par les pas très fréquentables cyclotouristes. Un équivalent de la ruta 40 sud-américaine en somme. Nous terminons cette première journée de vélo au Laos de bonne heure. Nous trouvons une guest house miteuse sur le bord de la route près de la ville de Phon Hong et passons le reste de la journée à regarder  Indiana Jones 4 qui est un très mauvais film si vous voulez mon avis.
       
       Le lendemain matin nous faisons grise mine. On avait à peu près assimilé le fait que nos journées commencent avant le soleil mais ce qui nous met un peu en rogne parfois c’est de devoir avaler un Pho pour commencer la journée. Le Pho c’est une délicieuse soupe de nouilles de riz, légumes et bœuf mais à 5h30 c’est lassant tout de même. Côme, dont la bonne humeur tombe parfois comme un cheveu dans le pho,  nous arrachera tout de même un sourire en nous disant « allez les gars  smile on fait une Pho-to ». 

Il est 5h Phon Hong s'éveille






       Notre sourire revient définitivement au cours de la journée à mesure que le paysage se dévoile. La route 13 jusqu’alors toute plate commence à onduler doucement  sous nos pneus. Ces premières collines nous immergent progressivement dans le fantastique paysage de montagne qui nous attend pour les prochaines étapes. Mention spéciale pour ce petit village de pêcheur niché dans une vallée au bord d’une belle rivière dont le glou-glou nous a immédiatement séduit (malheureusement nous ne retrouverons pas son nom parce que j’ai paumé la carte du Laos…). Les derniers kilomètres avant la ville de Vang Vien laissent apparaitre les premiers sommets de la région, de gigantesques blocs de pierre  grise surgissent au milieu de collines recouvertes de forêts. 

Ledit village en image

Oh le pont de la rivière Kwai !






     Nous arrivons à Vang Vieng une ville créée de toute pièce au cœur de ce décor vraiment spectaculaire, et toute entière dédiée au tourisme. Les deux rues du bled sont bourrées à craquer d’hôtels et de restaurants au milieu desquels se promène un bon paquet de jeunes backpackers. Il  fait cependant bon vivre à Vang Vieng, tout y est étrangement bon marché, le paysage est magnifique et la rivière qui coule au pied de la ville est bien rafraîchissante.  Dès les premières heures nous sautons dans nos maillots de bain pour aller faire un petit plouf. Quelques minutes après nous sommes assaillis par  un groupe de pirates laotiens hauts comme trois litchis qui grimpent sur nos petites épaules endolories par tant de vélo.  A la nuit tombée nous nous effondrons de fatigue et nous nous endormons sans attendre.

On vous l'a dit haut comme 3 litchis et encore...



Vang vieng


        Le lendemain nous voulons faire quelque chose de constructif. La spécialité de Vang Vieng est le tubing, une activité qui consiste à descendre une rivière paisible vautré dans une bouée en buvant des bières. Mais attention c’est plus dangereux que cela n’y parait, il y‘a au moins un mort par an du fait d’une consommation excessive d’alcool (d’après notre Lonely Planet c’est dire !). Ne voulant pas risquer notre peau bêtement nous décidons de nous tourner vers des activités moins dangereuses. Nous partons donc à quelques kilomètres de là sur une charmante route de cailloux pour passer la journée autour d’un lac à l’eau étrangement bleue. Nous  nous y prélassons toute la journée en compagnie de beaucoup de nos collégues backpackers qui ont probablement eux aussi décidés de faire quelque chose de constructif.





         Dès le jour suivant nous enfourchons nos bicyclettes pour continuer l’aventure vers la célèbre ville de Luang Prabang point d’orgue de notre périple laotien. Ce matin-là à 5h15 précise se passe une scène vraiment terrible. Alors que nous nous apprêtons à quitter notre auberge à pas de loups avec nos vélos  nous tombons nez à nez avec un groupe de fêtards tranquillement attablés sur la terrasse et sirotant des bières en attendant le lever du soleil. Les salauds ! Pas facile de se mettre en selle après ça ! Mais courageux comme des lions nous partons ! Le ciel ne tarde pas à nous récompenser en déversant sur nous des averses diluviennes (que Côme ponctue à chaque fois d’un « bin vous voyez c’est ça la mousson »). Ces pluies qui durent entre 5min et 2h nous permettent de progresser toujours un peu plus dans l’art du mot fléché (en 13 lettres,  amateur de mot fléchés : verbicruciste pan !).  

Tricheurs...



        La pluie finit par nous laisser un peu de répit et nous continuons notre petit bonhomme de chemin. Les collines se transforment petit à petit en cols et nous prenons conscience que nous entrons pour de vrai dans les montagnes. Les cols laotiens nous en font baver, certaines portions sont salement raides car, contrairement à leurs homologues péruviens, les ingénieurs du coin ne s’emmerdent pas avec des lacets inutiles. Et oui après tout c’est quand même plus simple d’aller tout droit ! Mais le paysage autour de nous est une vraie récompense à nos efforts. Nous sommes cernés par ces magnifiques sommets aiguisés surgis de nulle part dont une brume mystérieuse accroche les flancs. La lumière de fin de journée donne à ce panorama une beauté indéfinissable. Nous nous accordons pour dire que c’est l’une des plus belle route que nous ayons emprunté. Finalement comme le dit ce vieux proverbe laotien « si tu veux en prendre plein les mirettes, prépares tes gambettes ». Nous nous arrêtons dans une petite auberge perdue dans  les hauteurs pour passer la nuit et nous découvrons tout heureux l’existence d’une source d’eau chaude à proximité dans laquelle nous plongeons en nous rappelant de doux  souvenirs d’Amérique du Sud…


10% ? Mais t'es fada toi !



Arg plus de PQ ! Ah moins que ...

         C’est donc bien reposé que nous partons le matin suivant à l’abordage des cols. Et on a beau dire on ne s’y fait jamais vraiment aux cols ! Ca grimpe toute la journée et nous avalons un dénivelé positif impressionnant. Nous traversons de nombreux villages de montagnes dont la pauvreté tranche nettement avec ce que nous avions pu voir en Thailande et au Vietnam. En général dans chacun de ces villages les enfants nous courent après, nous tapent dans les mains ou nous lancent gaiement des « Sabaiiiidiiiii » bonjour en lao et d’autres trucs qu’on comprend pas vraiment. De quoi nous redonner du baume au cœur! La plupart du temps ces villages s’organisent autour de la route qui les traverse, tout le monde semble avoir quelque chose à vendre. Plus loin nous voyons quelques cultures qui donnent des touches de couleurs aux pentes des montagnes. Nous retrouvons un petit air andin en parcourant ces bleds posés au milieu de pas grand-chose. Nous notons avec amusement les groupes de laotiens disputant avec animation des parties de pétanque endiablées, les restes d’une culture française ! Nous avalons 80 km dans la souffrance et atterrissons finalement au sommet d’un col dans le village de Kiewkacham pour passer la nuit. L’endroit d’ailleurs semble fait pour accueillir les touristes qui font une halte sur leur route pour Ventiane, les menus sont traduits en anglais, on y vend quelques douceurs et trois guest houses peu chaleureuses s’alignent sur la route principale au cœur du village. Nous y croiserons trois motards australiens s’apprêtant à partir  à toute berzingue vers le Vietnam.

Misty moutains



Un double sabaidi extrémement bien réalisé

       Le lendemain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne nous continuons notre route vers Luang Prabang. Nous commençons par redescendre comme des flèches ce col qu’on s’était fatigué à monter la veille. Nous nous consolons en voyant monter dans l’autre sens les petits écoliers à vélo qui se dépêchent pour arriver à l’heure en cours, comme quoi on n’est pas les seuls à souffrir. La journée sera plutôt agréable finalement, un seul col pour deux grandes descentes, nous sommes gagnants. Nous arrivons à Luang Prabang en fin de journée, après s’être perdus puis retrouvés.  Ça fait un bout de temps qu’on nous en parle, tellement qu’on a un peu peur d’être déçus ! Le bijou du Laos parait-il ! Dès nos premiers tours de roues dans la rue principale nous sommes surpris, « c’est tout petit en fait ». Luang Prabang dégage un charme étonnant dès le premier abord. Les rues et les bâtiments sont admirablement conservés, probablement grâce au statut patrimoine mondial de l’Unesco. Les habitations sont toutes choupettes avec leur toit qui rebique et leur façade en bois . La ville regorge de temples et de pagodes et l’on croise des bonzes à chaque coin de rue. Luang Prabang est au confluant des eaux chaudes et bouseuses du Mekong avec les eaux non moins chaudes et non moins boueuses du Nam Kham. Le tourisme est l’activité centrale de la ville, il n’y a qu’à voir la profusion de restaurants, de bars, d’hôtels et d’agences touristiques. Mais surtout le tourisme à Luang Prabang se dégage par son élégance. Tout y est classe, stylé, un petit quelque chose de parisien peut être. So trendy Luang Prabang ! Nous déambulons donc au milieu des boulangeries françaises, des restaurants chics, des bars loundge et des vendeurs de smoothies.  Autant vous dire que l’on ne s’est pas senti à l’aise tout de suite avec nos t-shirts crapouilleux et nos barbes crasseuses. Le calme et l’élégance de la ville nous intimide presque le premier soir alors que nous cherchons un petit endroit où manger un fried rice bon marché.  
Trendy Luang Prabang, 


Bon sang mais c'est ça la solution contre le soleil !

     Cette impression s’efface très vite le lendemain et nous sommes immédiatement conquis par la beauté de la ville. Malgré un tourisme très développé Luang Prabang conserve une douceur rare en Asie. C’est avec un vrai plaisir que nous arpentons la ville en observant l’animation tranquille des rues.  Il est même possible de se retrouver sur un trottoir et de ne pas entendre un seul bruit. C’est dire ! Nous profitons à leur juste valeur de ces moments de calme. Nous trainassons au lit, puis nous trainassons dans la ville, puis nous trainassons sur les berges du Mekong. Bref nous nous laissons porter par l’atmosphère toute laotienne de l’endroit. 

Luang Prabang




        Le lendemain nous partons à la découverte des très célèbres cascades de Kuang Si. Là encore le charme de Luang Prabang opère. Malgré un flot de touristes impressionnant les chutes d’eaux conservent leur beauté et leur attractivité. L’eau y est turquoise et nous passons une après-midi entière à nous prélasser dans les nombreux bassins naturels du site. Un vrai bonheur d’avoir accès à cet oasis de fraicheur dans ce monde de brutes !  Nous passerons finalement 4 jours à Luang Prabang, juste le temps qu’il faut pour s’approprier la ville, faire un peu la fête avec un sympathique couple allemand et s’offrir quelques petits plouf dans notre Mekong adoré.


L'équipe de france de glandouille se préparant pour la coupe du monde


Attaquant de pointe


Défenseur rugueux

Gros malin

Nous mettons ensuite en place notre plan pour la fin de notre trip asiatique : rejoindre le nord de la Thailande grâce à un habile bateau qui remonte le fleuve en deux jours jusqu’à la frontière avec le Laos (et le mythique triangle d’or) puis nous balader en vélo dans les vertes montagnes thaïlandaises jusqu’à épuisement. Aussitôt dit aussitôt fait ou presque, le jour du départ nous nous perdons lamentablement sur les routes laotiennes et ratons à quelques minutes près notre embarcation. Il faut dire que c’est pas facile de demander sa route ici, notre niveau de laotien étant à peu près aussi élevé que leur niveau d’anglais. Bref nous passons une matinée légèrement agaçante à faire l’essuie-glace sur la route 13 en cherchant l’embarcadère. Nous finirons donc par le trouver mais trop tard. Qu’importe dès le lendemain matin nous sommes au garde à vous pour embarquer sur le « slow boat » vers la Huay Xai la ville frontière avec la Thailande. Le terme de slow boat colle parfaitement avec notre bateau, nous passons deux jours à voguer tranquillement sur les eaux calmes du Mekong. Nous traversons de magnifiques régions assez reculées du Laos, partout le fleuve est cerné par d’innombrables collines recouvertes d’une épaisse végétation. De  temps à autre nous apercevons un petit groupement d’habitations perdues au milieu de rien qui nous laisse comme toujours une étrange sensation de bout du monde. Nous arrivons finalement à la ville frontière et bien fatigués par toute cette eau (on n’est pas des marins nous en fait) et partons illico nous coucher. Demain nous repassons en Thailande, l’occasion de changer de caleçon !


Méfiance... Genies au travail

Mekong encore et toujours



1 commentaire:

  1. Vos pistes indigènes vont en faire rêver plus d'une!
    Tonton Pierre

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